Fiches de lecture

Les fiches de lecture n'ont pas la prétention de résumer le livre mais ont pour but d'en relever quelques éléments particulièrement intéressants.

FREUD, S., (1939), Moïse et le monothéisme. Paris, Gallimard, 1975.

"(...) symptômes névrotiques individuels, symptômes qui nous sont bien connus en tant que répétitions d'événements importants, depuis longtemps oubliés, survenus au cours de l'histoire primitive de la famille humaine." p; 79-80

"On appelle traumatismes les impressions reçues dans le jeune âge et plus tard oubliées et nous leur assignons un rôle très important dans l'étiologie des névroses. Mais est-il bien vrai que l'étiologie des névroses soit en général traumatique ? A ceux qui affirment cette origine, on objecte immédiatement qu'en certains cas il n'est guère possible de retrouver et de mettre en évidence, dans l'histoire précoce du névrosé, un semblable traumatisme. Souvent nous en sommes réduits à ne rien découvrir d'autre qu'une réaction insolite à certains événements, à certaines obligations que tout être est obligé de subir. Nombre d'individus les supportent de la façon que nous qualifions de normale. Quand il ne nous est possible d'expliquer la névrose qu'en invoquant telle prédisposition constitutionnelle, héréditaire, nous sommes naturellement tentés de dire que la névrose n'a pas été acquise, mais qu'elle s'est lentement développée.
Toutefois il convient ici de noter deux faits : d'abord que la genèse des névroses se ramènent partout (p. 99) et toujours à des impressions infantiles très précoces (de sorte qu'il est insensé de prétendre, comme certains le font, qu'on peut exercer la psychanalyse sans rechercher les événements de la période infantile et sans tenir compte de celle-ci) et ensuite que dans certains cas dit "traumatiques", les effets résultent évidemment d'une ou de plusieurs fortes impressions ressenties dans l'enfance. Ces impressions ont échappé à une liquidation normale et l'on est ainsi tenté de dire que si les événements en question n'étaient pas survenus, la névrose ne se serait pas non plus déclarée. (...)
Il est très possible de réunir dans une conception unique les deux conditions étiologiques ; il s'agit seulement de définir ce qu'on considère comme traumatique. Si nous admettons que l'élément quantitatif seul donne à un événement son caractère traumatique, nous en devons conclure que lorsque cet événement provoque certaines réactions pathologiques insolites, c'et qu'il a été trop exigé de la personnalité. Nous dirons donc que certains faits agissent comme des traumatismes sur certaines constitutions, tandis qu'ils demeurent sans effet sur d'autres. De là, la conception d'une échelle mobile, de ce qu'on appelle une "série complémentaire" où deux facteurs concourent à l'étiologie, un moins l'un étant compensé par un plus de l'autre. En général les deux facteurs agissent ensemble et ce n'est qu'aux deux extrémités de la série que nous pouvons parler d'une motivation simple." p. 100
> pas accorder d'importance à la différence entre étiologie traumatique et étiologie non traumatique.
(...) nos recherches nous ont montré que ce que nous appelons phénomène ou symptôme d'une névrose est dû à certains événements et impressions qui justement à cause de cela, sont à nos yeux des traumatismes étiologiques.

Caractères communs à ces événements (traumatismes)
a) "Tous se situent dans la première enfance jusqu'à la cinquième année environ. Les impressions reçues à l'époque où l'enfant commence à parler sont particulièrement intéressantes ; la période qui s'étend entre deux et quatre ans semble la plus importante ; il n'est pas possible de déterminer avec précision à quel moment débute cette réceptivité aux traumatismes.
b) Les événements en question sont, en règle générale, totalement oubliés et restent inaccessibles au souvenir. Ils appartiennent à la période d'amnésie infantile, laquelle est souvent interrompue par quelques fragments de souvenirs.
c) Il s'agit d'impressions d'ordre sexuel ou agressif et certainement aussi de blessures précoces faites au moi (blessures narcissiques). Ajoutons que d'aussi jeunes enfants ne sont pas encore capables comme ils le seront plus tard de distinguer les actes sexuels des actes purement agressifs (interprétation "sadique" erronée de l'acte sexuel). Cette très frappante prédominance du facteur sexuel a besoin d'être théoriquement expliquée." p. 101

Caractères communs aux symptômes névrotiques
a) "Les traumatismes ont deux sortes d'effets, des effets positifs et des effets négatifs. Les premiers constituent des tentatives pour remettre le traumatisme en valeur, c'est-à-dire pour ranimer le souvenir de l'incident oublié ou plus exactement pour le rendre réel, le faire revivre. S'il s'agissait d'un lien affectif précoce, ce tendre sentiment renaît de façon analogue en s'adressant cette fois à d'autres personnes. On donne à l'ensemble de ces effets le nom de "fixations au traumatisme" ou encore d'"automatismes de répétition". Ils peuvent être intégrés dans un moi soi-disant normal et conférer à celui-ci, en tant que tendances permanentes, leur caractère d'immuabilité bien que, ou plutôt du fait que leur fondement réel, leur origine historique aient été oubliés. C'est ainsi qu'un homme qui a eu, dans son enfance, un attachement excessif et aujourd'hui oublié à sa mère, recherchera peut-être, toute sa vie durant, la femme dont il pourra dépendre et qu'il laissera le nourrir et l'entretenir. Une jeune fille, séduite dès son jeune âge, pourra organiser toute sa vie sexuelle ultérieure de façon à toujours provoquer de semblables assauts. Envisager ainsi le problème de la névrose nous permet d'aborder celui de la formation du caractère en général. p. 108
Les réactions négatives tendent vers un but diamétralement opposé. Les traumatismes oubliés n'accèdent plus au souvenir et rien ne se trouve répété ; nous les groupons sous le nom de "réactions de défense" qui se traduisent par des "évitements", lesquels peuvent se muer en "inhibitions" et en "phobies". Ces réactions négatives contribuent considérablement, elles aussi à la formation du caractère. De même que les réactions positives, elles sont, somme toute, des fixations au traumatisme tout en obéissant à une tendance inverse. Les symptômes de la névrose proprement dite constituent des compromis auxquels contribuent toutes les tendances positives et négatives issues des traumatismes. Ainsi, c'est tantôt l'un, tantôt l'autre des deux composants qui prédomine. Ces réactions antagonistes engendrent des conflits que le sujet ne parvient généralement pas à résoudre.
b) Tous ces phénomènes, les symptômes comme les rétrécissements du moi et les modifications permanentes du caractère ont un caractère compulsionnel c'est-à-dire que si leur intensité psychique est grande, ils prennent vis-à-vis des autres processus psychiques adaptés au monde extérieur et qui obéissent aux lois de la pensée logique, une indépendance marquée. Nullement ou insuffisamment influencés par la réalité extérieure, ils ne tiennent guère compte des choses réelles ou des équivalences psychiques de celle-ci, de sorte qu'ils se trouvent aisément en opposition active avec elles. Ils constituent, pour ainsi dire, un état dans l'Etat, un parti inaccessible, impropre au travail en commun, mais qui cependant réussit parfois à vaincre les autres, ceux qu'on appelle normaux, et à les domestiquer. Quand cela arrive, c'est que la réalité psychique interne en arrive à prédominer sur la réalité extérieure et la voie vers la psychose est ainsi ouverte." p. 105

"(...) La névrose peut être considérée comme la manifestation directe d'une "fixation" de ces malades à une époque précoce de leur passé". p. 105

A propos de la latence
"Au traumatisme infantile peut succéder immédiatement une névrose infantile ; cette dernière se manifeste par des efforts de défense qui s'accompagnent de symptômes. Une pareille névrose peut durer longtemps et provoquer de voyantes manifestations ou bien demeurer latente et passer inaperçue. C'est généralement la défense qui y prend le dessus, mais, quoi qu'il arrive, certaines modifications du moi se produisent et demeurent comme des cicatrices. Il est rare qu'une névrose infantile se continue sans interruption par une névrose de l'adulte. Il arrive bien plus fréquemment qu'une période de normalité lui fasse suite, processus qui est sans doute facilité ou permis par la latence physiologique. C'est plus tard seulement que la névrose deviendra manifeste par l'effet retardé du traumatisme. Cela se produit soit au moment de la puberté soit un peu plus tard. Dans le premier cas, les pulsions renforcées par la maturité physique reprennent la lutte dans laquelle elles avaient d'abord succombé. Dans le second cas, la névrose se manifeste plus tard lorsque les réactions et les modifications du moi provoquées par le mécanisme de défense nuisent à la réalisation des tâches nouvelles imposées au moi par la vie, de sorte que de graves conflits surgissent entre un monde extérieur exigeant et un moi qui cherche à protéger l'organisation si péniblement établie lors de sa lutte défensive. Cette période de trêve entre les premières réactions au traumatisme et l'apparition ultérieure de la maladie est un phénomène typique. p. 105-106
La maladie peut être considérée comme une tentative de guérison, comme un effort tenté pour rassembler les éléments du moi que le traumatisme avait dissocié, pour en faire un tout puissant en face du monde extérieur. Toutefois cette tentative est rarement couronnée de succès si le travail analytique ne vient à la rescousse et même en ce dernier cas, la réussite n'et pas toujours certaine. Assez souvent, le processus s'achève par la destructuration, le morcellement du moi ou par la victoire sur ce dernier d'éléments précocement dissocié et dominé par le traumatisme;" p. 107

Trois conditions pour que le refoulé puisse pénétrer dans le conscient :
- la puissance du contre-investissement est affaiblie
- renforcement des éléments pulsionnels liés au refoulé (ex. puberté)
- "Certains événements récents peuvent parfois faire surgir des impressions et provoquer des incidents si semblables au matériel refoulé qu'ils parviennent à réveiller ce refoulé. Dans ce cas, le matériel récent se renforce de toute l'énergie latente du refoulé et ce dernier agit à l'arrière-plan de l'impression récente et avec son concours." p. 128-129

moi-ça : "Les ça est plus ancien que le moi qui s'en est détaché sous l'influence du monde extérieur comme l'écorce se détache de l'arbre." p. 130
"Les impressions causées par les traumatismes précoces (...) sont soit non traduites dans le préconscient soit bientôt ramenées, par le refoulement, à l'état de ça.
(...) la plus forte des influences obsédantes découle d'impressions reçues à l'époque de l'enfance où, à ce que nous croyons, l'appareil psychique de l'enfant n'est pas encore prêt à les accueillir." p. 169

 

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