Psychologie du développement

3. Orientation psychanalytique

 

3.6. Les fondements de la psychanalyse freudienne

        3.6.3. Les stades de l'investissement libidinal

2)      Le stade anal

            Ce stade est caractérisé par une organisation de la libido sous le primat de la zone érogène anale. Cette phase est aussi appelée sadique-anale en relation avec le développement de la maîtrise musculaire et en référence à l’opposition activité/passivité qui la spécifie. Ce stade constitue le point d’ancrage du sadomasochisme. Il est celui dont dérivent les tendances à l’obstination ou au laisser-aller. Une certaine impulsivité libère l’expression de même qu’une certaine compulsivité est utile en des matières où l’ordre, la ponctualité et la propreté sont essentielles.

            « La régulation réciproque entre adultes et enfant doit maintenant faire face à son épreuve la plus sévère. Si un contrôle extérieur, grâce à une éducation trop rigide ou trop précoce, persiste à dépouiller l’enfant de ses efforts pour maîtriser progressivement ses intestins et ses autres fonctions de par sa volonté propre et son libre choix, il sera une fois de plus confronté à une double rébellion et à une double défaite. Impuissant en face de son instinctualité anale, effrayé quelquefois par les remous de ses entrailles et dénué de tout pouvoir extérieur, il sera contraint de chercher satisfaction et contrôle soit dans la régression soit dans une progression factice. (…) Un sentiment de self-control, sans qu’il y ait perte de l’estime de soi, est la source ontogénique d’un sentiment de volonté libre. D’un sentiment inévitable de perte du self-control et du contrôle exagéré des parents, découle une durable propension au doute et à la honte ». (Erikson p. 106)

Lors de l’acquisition du contrôle sphinctérien, l’enfant est partagé entre la rétention (érotisme anal) et l’expulsion des fèces. Il renonce à cet autoérotisme pour faire don à sa mère de ses fèces qui prennent ainsi une valeur symbolique. Une condition nécessaire pour que l’enfant ne ressente pas les attentes de propreté de ses parents comme une contrainte imposée, comme une atteinte à son libre arbitre, est qu’il puisse faire ce cadeau à sa mère. Il prend ainsi une position active face aux exigences de propreté et ne subit plus passivement cette obligation de renoncer à l’érotisme lié à la rétention des fèces.

            “Un des meilleurs présages d’une bizarrerie de caractère ou d’une nervosité ultérieure est qu’un nourrisson se refuse obstinément à vider son intestin lorsqu’on l’a mis sur le pot, c’est-à-dire lorsque cela plaît à la personne chargée de s’occuper de lui, mais qu’il réserve cette fonction pour son propre bon plaisir. Naturellement, peu lui importe de salir son lit ; son seul souci est de ne pas laisser échapper le gain de plaisir supplémentaire lors de la défécation”.

Abraham (1924) a proposé de différencier deux phases au sein du stade sadique-anal en distinguant dans chacune des composantes deux types de comportement opposés par rapport à l’objet.

Stade sadique anal

 

érotisme anal

pulsion sadique

1ère phase

l’évacuation

la destruction de l’objet

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2ème phase

la rétention

le contrôle possessif

L’accession d’une phase à l’autre constitue un progrès décisif vers l’amour d’objet, au point que la ligne de clivage entre régressions névrotiques et psychotiques passe entre ces deux phases.

Erikson souligne le danger psychiatrique de ce stade : l’aggravation potentielle de l’aliénation normative. « L’enfant sensible peut tourner toute sa force d’incitation à exercer son jugement contre lui-même et à développer ainsi une conscience précoce. Au lieu de s’entêter  à prendre possession des choses pour les expérimenter dans le jeu, il sera obsédé par son propre penchant à la répétition et désirera obtenir les choses « exactement comme ça » (just so), et seulement dans une suite et selon un rythme donnés. Avec sa manie obsessionnelle infantile et sa tendance à temporiser, ou en devenant rigoriste en matière de répétitions rituelles, l’enfant apprend à acquérir du pouvoir sur ses parents dans des secteurs où il ne pourrait trouver auprès d’eux une régulation mutuelle à grande échelle. Cette victoire creuse apparaît alors comme le modèle infantile d’une névrose compulsionnelle d’adulte » (p. 108).

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