Psychologie du développement

3. Orientation psychanalytique

 

3.6. Les fondements de la psychanalyse freudienne

        3.6.3. Les stades de l'investissement libidinal

4)      La période de latence

        Cette période s’étend du déclin du complexe d’Oedipe au début de la puberté. Cette période correspond à
-         une
intensification du refoulement[1] - qui a pour effet une amnésie[2] recouvrant les premières années,
-         une transformation des investissements d’objets en identifications aux parents,
-         un développement des sublimations (acquisition du savoir et des outils culturels).

Elle se caractérise donc par une importante diminution des activités pulsionnelles, par une désexualisation des relations objectales et des affects, les désirs érotiques se transformant en tendresse.

        D’un point de vue structural, le moi s’autonomise, tandis que se constitue le surmoi à la suite d’une intériorisation inconsciente des exigences et des interdits parentaux[3]. L’enfant fait l’apprentissage des conduites sociales. Le moi en lutte contre les pulsions utilise les contre-investissements pour son adaptation de plus en plus grande au réel. Cette période de refoulement intense se caractérise par l’apparition de nouveaux mécanismes de défense, telle que les formations réactionnelles, par une inhibition très importante des processus fantasmatiques. L’invitation à l’association libre est vécue comme une menace pour l’intégrité du moi.

Formation réactionnelle[4] :
-                     Attitude ou habitus psychologique de sens opposé à un désir refoulé, et constitué en réaction contre celui-ci (pudeur vs exhibitionnisme).
-                     En termes économiques, la formation réactionnelle est un contre-investissement d’un élément conscient, de force égale et de direction opposée à l’investissement inconscient. Elle peut être définie comme une utilisation par le moi de l’opposition inhérente à l’ambivalence pulsionnelle.
-                     Les formations réactionnelles peuvent être très localisées et se manifester par un comportement particulier, ou généralisées jusqu’à constituer des traits de caractère (scrupulosité, pudeur, défiance de soi, dégoût) plus ou moins intégrés à l’ensemble de la personnalité.
-                     Du point de vue clinique, les formations réactionnelles prennent valeur symptomatique dans ce qu’elles offrent de rigide, de forcé, de compulsionnel, par leurs échecs accidentels, par le fait qu’elles aboutissent parfois directement à un résultat opposé à celui qui est consciemment visé (l’attitude de propreté extrême vise à masquer le jeu de l’érotisme anal mais aboutit à centrer l’existence sur la poussière et la saleté).
-                     Dans la névrose obsessionnelle, cette défense est réussie dans la mesure où les éléments en jeu dans le conflit, la représentation sexuelle aussi bien que le « reproche » qu’elle suscite, sont globalement exclus de la conscience au profit des vertus morales poussées à l’extrême. On parle d’altérations du moi dans la mesure où cette défense est utilisée de manière permanente comme si le danger était toujours présent.
-                     Les formations réactionnelles jouent un rôle dans le développement de tout individu : “… les excitations sexuelles éveillent des contre-forces (motions réactionnelles) qui, pour pouvoir réprimer efficacement ce déplaisir (résultant de l’activité sexuelle) établissent les digues psychiques (…) : dégoût, pudeur, moralité”
[5].


[1] Le refoulement : Au sens propre, c’est l’opération par laquelle le sujet cherche à repousser ou à maintenir dans l’inconscient des représentations (pensées, images, souvenirs) liées à une pulsion. Il se produit dans les cas où la satisfaction – susceptible de procurer par elle-même du plaisir – risquerait de provoquer du déplaisir à l’égard d’autres exigences. Dans une acception plus large, Freud a parfois utilisé ce terme pour désigner une défense considérant le modèle théorique du refoulement comme prototype d’autres opérations défensives.
Le refoulement joue un rôle prépondérant dans les névroses et, en particulier, dans l’hystérie. Le refoulement est décrit d’emblée par Freud comme une opération dynamique, impliquant le maintien d’un contre-investissement, et toujours susceptible d’être mis en échec par la force du désir inconscient qui cherche à faire retour dans la conscience. Le refoulement ne porte pas sur la pulsion mais sur ses représentants-représentations. Le refoulement a son corollaire : le retour du refoulé.
[2] L’amnésie infantile est autre chose qu’une incapacité fonctionnelle. Elle résulte du refoulement portant sur la sexualité infantile. Elle s’étend jusqu’au déclin du complexe d’Œdipe et l’entrée dans la période de latence. Elle porte sur la presque totalité des événements de l’enfance. Le refoulement des souvenirs de l’enfance jugés irrecevables par le moi, nécessaire parce que les relations avec le père et la mère sont vécues si fort qu’il faut que cette intensité sensuelle, sexuelle s’apaise pour que l’enfant puisse se constituer un champ individuel. Pendant la période de latence, tout s’apaise. L’enfant vit son énergie avec ses semblables et investit intellectuellement divers domaines selon l’éventail des possibilités à sa disposition. La 1ère curiosité de l’enfant est toujours d’ordre sexuel et c’est à partir de là que se développe l’intelligence.
[3] « L’exercice de l’ « autorité » (qu’ils le veuillent ou non, les parents et les éducateurs l’exercent) est le résultat d’une compétence psychologique qui sait communiquer un savoir, une expérience ; il implique aussi une capacité à vivre et à dire les conditions dans lesquelles la vie est possible ; il implique encore la volonté d’adhérer à des règles et à des lois justes et nécessaires sans pour autant se sentir inhibé ». ANATRELLA, T., Interminable adolescence – Les 12-30 ans, Paris, Cerf/Cujas, 1993, p. 25.
[4] LAPLANCHE, J., & PONTALIS, J.-B., (1967), Vocabulaire de la psychanalyse, Paris, PUF.
Formation substitutive : Désigne les symptômes ou des formations équivalentes comme les actes manqués, les traits d’esprit, etc., en tant qu’ils remplacent les contenus inconscients. Cette substitution doit être prise dans une double acception : économique, le symptôme apportant une satisfaction de remplacement au désir inconscient ; symbolique, le contenu inconscient étant remplacé par un autre selon certaines lignes associatives.
Formation de compromis : Forme qu’emprunte le refoulé pour être admis dans le conscient en faisant retour dans le symptôme, le rêve, plus généralement toute production de l’inconscient : les représentations refoulées y sont déformées par la défense jusqu’à en être méconnaissables. Dans la même formation, peuvent ainsi se satisfaire – en un même compromis – à la fois le désir inconscient et les exigences défensives.
[5] FREUD, S., (1924), Trois essais sur la sexualité. Paris, Gallimard, 1962.

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