Psychologie du développement

3. Orientation psychanalytique

 

3.6. Les fondements de la psychanalyse freudienne

        3.6.3. Les stades de l'investissement libidinal

5)      L'adolescence et le primat du génital

Ø       Une période de crise

            L’adolescence est une période transitoire entre deux états (l’enfance et l’âge adulte). L’adolescence est un travail de la vie psychique, un processus, qui met en œuvre les structures de la personnalité à partir desquelles le garçon comme la fille vont se réorganiser. L’adolescence ne se confond pas avec la puberté.

L’adolescence est une crise
-         de par les conflits intra-psychiques qui animent le sujet, dus aux remaniements corporels, intellectuels, affectifs et pulsionnels,
-         et de par les conflits inter-relationnels dus à la redistribution des rôles et au changement de statut du sujet.

Ces deux sortes de conflits impliquent des modifications des investissements narcissiques et des investissements objectaux.

            Au cours de cette période, les processus d’individuation sont réactivés et les conflits oedipiens réactualisés avec la remise en cause des représentations de soi, tant sur le registre de l’identité subjective que sur le registre de l’identité sexuelle. Une des tâches spécifiques de l’adolescence est l’intégration d’une représentation de soi sexuée (Freud). Les pulsions nouvelles conceptualisées par la complémentarité des sexes, ce qui devrait favoriser l’objectalisation, amènent une nouvelle fonction symbolique et le démenti du monisme et de la menace de castration. L’enjeu de cette crise est l’accès à une position de sujet désirant.

 « En prenant ses distances par rapport à l’autorité de ses parents, il entre dans un conflit qui peut l’aider à se dégager de la relation infantile [Le garçon préadolescent combat l’angoisse de castration que lui inspire la mère archaïque. La fille, de son côté, se défend contre l’attirance régressive vers la mère préoedipienne]. A la puberté, le surmoi parental introjecté durant l’enfance, et qui a permis une première résolution oedipienne, se relâche. Le pubère, puis l’adolescent aura tendance, pendant toute une période de son histoire, à inscrire ses conduites à la limite de la transgression en jouant avec les interdits et les conventions, allant jusqu’à des comportements asociaux du fait d’une idéal adulte trop difficile à atteindre par rapport à ses possibilités ».(p. 55) [1] Cette situation perturbe l’équilibre du parent qui doit consentir à faire le deuil de son enfant pour le retrouver autrement.

            La crise signe un moment de déficience du sujet qui oscille entre être et devenir, changer et rester le même. Il y a un paradoxe entre la recherche de la singularité et la peur de la nouveauté. Ce sujet éprouve aussi un vif sentiment d’inadéquation, d’étrangeté, voire de dessaisissement, de par la relation nouvelle avec son corps, la modification du type d’échanges avec les autres depuis que la fonction génitale est à maturité, la nouveauté du rapport aux normes socioculturelles. Il y a une ouverture des limites qui confrontent le sujet à la redéfinition d’un espace potentiel.

            Identité et identification sont profondément corrélées. L’adolescence est une crise interne, narcissique de recherche d’identité et une crise externe où le relâchement des liens infantiles aux parents est nécessaire pour permettre de nouveaux attachements mais sans pour autant être détruits afin d’éviter le vide intérieur (perte des objets internes). On peut parler d’une crise des limites entre l’adolescent et son environnement. La crise intervient comme organisateur de ce bouleversement.

            C’est un moment particulièrement difficile parce qu’il réédite les traumatismes des premières années de vie dans la répétition de l’expérience de la rupture de la continuité. Le sujet est mis dans l’obligation de reformuler son histoire. Les risques sont essentiellement
-          le passage à l’acte : L’acte devient le moyen de décharge de la tension pulsionnelle non élaborée, un moyen d’éviter une réalité interne insupportable. L’attitude de défi est une façon de maintenir la dépendance tout en la niant, à mettre en parallèle avec la tendance anti-sociale de Winnicott. L’acte vient signifier dans la dimension spatiale ce qui ne peut s’inscrire dans la temporalité. Faute de projet, d’identification, la poussée de la libido est violence parce qu’aucune représentation ne la prend en charge.
-          le repli : Le repli et la mélancolie de la perte d’objet sont l’œuvre d’un narcissisme mortifère (Green, 1984) lorsque le sujet est déconnecté de ses assises constitutives ou que l’aire transitionnelle est défaillante à fournir un contenant.


[1] ANATRELLA, T., Interminable adolescence – Les 12-30 ans, Paris, Cerf/Cujas, 1993.

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